dimanche 11 avril 2010

Xénophobie et antisémitisme en France de 1890 à 1962

En France la fin du 19ème siècle est marquée par diverses catastrophes nationales : défaite dans la guerre contre la Prusse, perte de l’Alsace et la Lorraine et drame de la Commune de Paris. C’est donc avec cet héritage non négligeable que le nationalisme français jadis progressiste cherche désormais ses sources d’inspiration dans le passé et devient plus « revanchard », intolérant, xénophobe et surtout antisémite. En effet la montée de l’immigration dès la fin du 19ème siècle, l’affaire Dreyfus, les diverses récessions économiques suscitent une montée de haine ; haine ou les étrangers et plus particulièrement les juifs deviennent les boucs émissaires. La xénophobie désigne en effet les sentiments systématiques de crainte, d'hostilité, voire de haine envers les étrangers, c'est-à-dire de ceux qui n'ont pas la même nationalité que soi ou qui n'appartiennent pas au même groupe (culture, religion, langue...). L'étranger est perçu comme une menace pour l'équilibre de vie et, donc comme un ennemi, ce qui entraîne des réactions de peur ou d'hostilité, ou les deux. Dans les formes extrêmes, la xénophobie peut dégénérer en haine ou en violence. L’antisémitisme d’autre part est une forme de racisme (avec l’idée d’une infériorité de race):c’est la religion qui est utilisée comme critère distinctif ; les juifs sont utilisés comme boucs émissaires à qui est attribuée la responsabilité des problèmes sociaux et ils sont accusés de conspirer contre l'humanité. L'antisémitisme tend, dans sa forme la plus extrême, à l'élimination des Juifs. La période de la fin du 19ème siècle marquée par l’affaire Dreyfus jusqu’au début des 1960’s (avec notamment la fin de la guerre d’Algérie) est marquée par une des phases de très forte hostilité envers les étrangers et les juifs.
Quels sont les avatars de cette xénophobie et de cet antisémitisme pendant cette période ? Dans quelle mesure xénophobie et l’antisémitisme deviennent les porte-parole d’une France portée par la haine ?
I) De 1890 à 1914 : émergence de la xénophobie et de l’antisémitisme
II) De 1914 à 1939 : de l’apaisement à la « clameur xénophobe » et antisémite des 30’s
III) Du régime de Vichy au début des 60’s (fin guerre d’Algérie)

I) De 1890 à 1914 : émergence de la xénophobie et de l’antisémitisme

1) point de départ de la perception des individus en tant qu’étrangers

On assiste à un essor de l’immigration pour pallier à la stagnation démographique de la France : situation d’appel qui voit les candidats à l’immigration se multiplier (accueil d’étrangers fuyant les persécutions religieuses avec notamment les juifs, organisation de filières d’immigrationessor de l’immigration italienne belges espagnole qui vient travailler dans des secteurs spécifiques tendance à la concentration dans certaines régions
Face à cela dès 1890 le symptôme de l’inquiétude à l’égard des étrangers se fait sentir volonté d’accroître le contrôle de la population étrangère
1889 : code de la nationalité qui veut empêcher de se voir constituer sur le territoire des noyaux allogènes qui entraînerait un maintien d’une population étrangère enracinée
C’est le début comme l’évoque G.Noiriel dans le Creuset Français de la dialectique du nous et de l’autre avec une stigmatisation progressive des « non nationaux » (c’est ici que s’élabore la dimension nationale de l’étranger)
Reproduction de thèmes stéréotypés de l’étranger qui est vient envahir la France
Noiriel parle de « xénophobie républicaine » (instituée juridiquement)

2) Flambée Xénophobe et antisémite

Une sigmatisation de ce nouveau groupe se fait sentir notamment sur la partie dont la barrière de la langue rend plus difficile l’intégration
De la part de certain une réelle volonté de palier à cette poussé xénophobe en faisant en sorte de s’intégrer ( adoption des valeurs,des réflexes qui ne les distinguent plus de la communauté englobante)
Néanmoins le thème de l’invasion persiste notamment pour certaines catégories d’étrangers comme els italiens, les polonais ou encore les juifs : on assiste à une multiplication d’actions xénophobes pendant la fin du 19ème siècle
1893 : Aigues mortes ou 20 italiens sont tués à coup de pelle et de cailloux
1894 : assassinat du président Sadi Carnot par un anarchiste italien poussé xénophobe contre les italiens
L’Affaire Dreyfus : catalyseur de la poussée antisémite (‘paroxysme’)
le point de départ de l'affaire Dreyfus, est une erreur judiciaire sur fond d’espionnage, dont la victime est le capitaine Alfred Dreyfus (1859-1935), juif et alsacien d'origine. Pendant douze ans, de 1894 à 1906, l'Affaire a bouleversé la société française. La révélation de ce scandale, dans J'accuse, un article d’Émile Zola en 1898, provoque une succession de crises politiques et sociales uniques en France. À son paroxysme en 1899, elle révèle les clivages de la France de la Troisième République. Elle divise profondément et durablement les Français en deux camps opposés, dreyfusards et anti-dreyfusards. Cette affaire est le symbole moderne et universel de l'iniquité au nom de la raison d'État. Enfin, elle suscite de très violentes polémiques nationalistes et antisémites diffusées par une presse influente.


3) Retombées

L’Action française fondée en 1899 pendant l’Affaire Dreyfus, avec à sa tète Charles Maurras est un mouvement antisémite le plus influent : son idéologie va à l’encontre de tous les idéaux de la Révolution Française : antidémocratique, monarchiste en antisémite. Tout se qui est allé de travers un jour dans l’histoire française est imputé aux juifs ou au étrangers en général, envahisseurs qui ont retirés le plus grand profit de la révolution.

L’Eglise catholique soutient ouvertement l’antisémitisme au travers de journaux catholiques comme La Croix, et Le Pèlerin.
En effet on assiste au développement du discours xénophobe dans la presse avec le thème de l’africain paresseux, l’asiatique habile, l’impulsivité de l’italien.
Se développe en plus d’un antisémitisme de droite (d’origine religieuse activé par un nationalisme français revanchard) un antisémitisme de gauche (d’origine sociale) considérant que le capital est aux mains des juifs en particuliers
Jaurès a notamment déclaré discours de Tivoli en 1898 : « nous savons bien que la race juive concentrée, passionnée subtile, toujours dévorée par une sorte de fièvre du gain quand ce n’est pas la force du prophétisme, nous savons bien qu’elle manie avec une particulière habileté le mécanisme capitaliste, mécanisme de rapine, de mensonge de corset, d’extorsion… »
Il est clair que l’antisémitisme et la xénophobie sont devenues les pièces majeures dans l’élaboration des doctrines socialistes. (Barrès : « que Dreyfus est capable de trahir, je le conclus de sa race »). Maurras présentera les juifs «(avec les francs-maçons, les protestants et les métèques) comme l’une des « quatre Etats confédérés » visant à la destruction de la France traditionnelle, dont le catholicisme est le fondement.
L’inquiétude face aux autres étrangers se poursuit dans les années 1910’s mais de manière plus dérobée :
1911 : on crée une carte d’identité pour réguler les sans papiers et les instances judiciaires disposent de plus en plus de données chiffrées dans la mesure ou les étrangers défraient la chronique des faites divers.


Considérée comme le paroxysme de l’antisémitisme en France et de la xénophobie en France, l’Affaire doit aussi être lu comme un des grands moments de la résistances aux passions juives : elle met en lumière en effet avec la réhabilitation de Dreyfus, les capacités de la société française de faire triompher la vérité et la justice, et devient exemple de lutte contre la xénophobie et antisémitisme virulents des ligues nationalistes ; L’Affaire a eu un autre effet : celui de rendre l’antisémitisme incompatible avec les idéaux républicains. On assiste peu à peu a une stabilisation de l’immigration étrangère qui se traduit par un certain apaisement à l’égard des étrangers et des juifs.


II) De 1914 à la fin des 30’s

1)Consensus relatif autour de l’Union sacrée

Les préjugés demeurent, les généralisations ne s’éteignent pas mais au bout du compte l’apaisement est réel, que confirment la Grande Guerre et l’Union Sacrée. Barrès admire alors, devant le sacrifice des soldats juifs morts en particuliers pour la France, « le désir passionné d’Israël de se confondre dans l’âme française ». Le patriotisme réconciliait-il les antidreyfusards et les juifs ?
Les étrangers deviennent une nécessité dans la Guerre : la ferveur xénophobe se calme. Les Etrangers joignent leur force dans la bataille qui se joue et même si la clameur xénophobe s’est apaisée ils n’en sont pas moins épargnés au front ou à l’arrière


2) Les années 20’s : entrée des étrangers et des juifs dans le débat politique

On assiste après la guerre à une multiplication d’articles consacrés aux étrangers (L’Action Française, Le Temps, L’Aube, Le Populaire…)
Cela redevient une préoccupation lancinante par cette omniprésence des étrangers en France : on s’inquiète toujours (publication dans la revue hebdo « discours aux français sur les étrangers »)
Pierre Drieux la Rochelle s’inquiète
Les pouvoirs publics déploient une étroite surveillance avec notamment le rôle du ministre de l’intérieur A.Sarraut en 1926 qui considère que l’Etat soit connaître l’état d’esprit et les effectifs des étrangers
Xénophobie et antisémitisme refont surface peu à peu.
L’Etat adopte une attitude répressive à l’égard de l’activisme politique : les étrangers et les juifs doivent faire profil bas. Mais cela n’est pas sans des attitudes quelque peu contradictoires :en effet en 1927 est adopté la loi de la nationalité qui facilite l’adoption de la nationalité aux étrangers.

3) Les années 30’s : clameur xénophobe et antisémite : le temps des multi crises

L’apaisement relatif ne survit pas à la grande crise des années 1930. Un cycle nouveau de passion antisémite et xénophobe est enclenché dont le prolongement, à la honte de la France, sera la participation du régime de Vichy à la mise en route du génocide nazi.
Vers 1930, on retrouve quelques-uns des éléments qui avaient présidé à la première vague antisémite des années 1890, et notamment l’immigration des juifs persécutés et menacés, notamment en Allemagne, mais aussi en Autriche et en Roumanie. La récession économique, le chômage indispose les français contre les étrangers en général et contre les juifs en particulier : « Nous ne souffrons pas d’une crise de chômage national s’écrie un député, Pierre Amidieu du Clos, à la chambre en 1931, mais d’une crise d’invasion étrangère »
Les attaques antisémites se multiplient dans la presse nationaliste, sans retenue.
Ralph Shor parle de « clameur xénophobe » dans 30’s : ensemble de la classe politique converge pour trouver dans l’exclusion des étrangers une solution simple et radicale aux difficultés de la France
« L’Etranger nous arrache le pain de la bouche »
Herriot se fait l’avocat de la main d’œuvre nationale « La France ne pourra bientôt plus nourrir ses propres enfants »
Nombreuses scènes de lynchage ont lieu dans les années 30
Affaire Stavisky en janvier 34 : le suicide du courtier juif russe Stavisky et les révélations au sujet de ses liens avec des politiciens corrompus provoque de grave émeutes ainsi qu’une tentative de « coup d’Etat » ( 6 février 34) contre le gouvernement
Blum et le gouvernement du Font Populaire : arrivée d’un juif à la tète du gouvernement français qui renforce le courant « M. Léon Blum, par toutes ses fibres, écrit Jean Pierre Maxence, représente l’étranger » ainsi que « mort au juif »
En 1938 et 1939, la législation restrictive du gouvernement Daladier contre les réfugiés politiques (notamment espagnols) et les juifs (victimes d’un nazisme en puissance en Allemagne) : sont refoulés aux frontières. « La France Aux Français ! »


Après la guerre, la montée de la xénophobie et de l’antisémitisme s’est fait peu à peu sentir notamment tout au long des années 30, ou la France inondée d’un raz de marée de publications antisémites pavent le chemin, à la collaboration avec les nazis sous Vichy.




III) De Vichy à la fin de la guerre d’Algérie (1962)

1) Sous Vichy

La montée de l’antisémitisme des années 30 apparaît avec le recul, comme la genèse des lois de vichy
Question évoquée par Paxton en 1981 Vichy et les juifs : question de la continuité avec la république du point de vue de l’antisémitisme
Vichy n’aurait rien inventélogique d’exclusion
Stigmatisation de « 3 groupes »
-les étrangers à proprement parler : on assiste à un renforcement du contrôle, des mesures de regroupement de la population étrangère
Livraisons aux allemands dans le cadre de l’armistice
-les naturalisés (français d’origine étrangère) sont exclus de la fonction publique, puis exclus des professions médicales puis interdiction d’être avocats.. On a cherché à revenir sur la loi de 1927
-les individus « regardés comme juifs » : dès octobre 1940 le statut des juifs (tt individu issu de 3 grands parents de race juive ou de 2 grands parents juifs mais si le conjoint est lui-même juif)
Juifs exclus de la fonction publique, internés dans les camps d’Algérie de la nationalité française.
Juin 1941 : 2ème statut des juifs aggravation : début de l’aryanisation des entreprises juivesspoliation de la richesse des juives
Rafle du Vel d’Hiv’ 1942 départs pour la déportation
Xénophobie et antisémitisme à outrance qui marquera l’histoire (la Shoah)

2) Après guerre : la seconde intégration ?

Personne ne pensait qu’on en aurait fini avec la xénophobie et l’antisémitisme en France après « Auschwitz »
Le discours antisémite et xénophobe à la libération n’a plus le droit de cité : la décence autant que la loi les interdisaient. Un nouvel apaisement s’imposait sur les ruines de l’entreprise hitlérienne et de la réaction vichyste
Mais chez les incurables les démons se sont peu à peu réveillés : par exemple le mouvement Poujade a repris en 1954, à mots couverts, les accusations antijuives : défenseurs des campagnes et des petites villes, des commerçants et des artisans menacés par le « gros », bientôt gagnés par la cause de l’Algérie française, les poujadistes ont vu en la personne de Pierre Mendès France, président du conseil (1954-1955), l’emblème de leur rejet : « bradeur d’empire », buveur de lait et champion de la lutte anti-alcoolique « dans le pays producteur de vins et de champagne », et surtout « dépourvus de sang gaulois dans les veines ». Par qui sommes nous gouvernés ? ‘il importe de les démasquer et de leur casser la g… »
Mouvement qui a révélé la persistante des mouvements antisémites en France
Parallèlement la population étrangère s’est diversifiée : avec notamment une augmentation de la population venant du Maghreb : et l’accroissement de la distance culturelle entre français et immigrés a eu pour effet de rendre tendus les relations entre euxrelent de xénophobie qui s’exprimera surtout dans les années de crise 70’s

3) Un véritable traumatisme

Stigmatisation de ces groupes qui ont révélé une France haineuse
Louis Ferdinand Céline « Qu’ils crèvent tous après on verra » Séparer l'ivraie du bon grain. [...] Le chirurgien fait-il la distinction entre les bons et les mauvais microbes ?
Juifs ont été considérés comme de la vermine à exterminer ainsi que les étrangers stigmatiser et vulgairement utilisés quand la nécessité s’en ressentait
Témoignage d’une page de l’Histoire que la France aurait préféré oublié mais qui pourtant restera à jamais dans les mémoires.



Conclusion :

Période qui témoigne d’un passé xénophobe et antisémite de la France : si la France n’a pas été « raciste » au sens stricte du terme et même si la république n’a jamais eu de législation xénophobe ou antisémite, la page de Vichy reste ouverte : il y eu des racistes, des antisémites, des xénophobes virulents en France.
Cette période d’antisémitisme et de xénophobie en France peut se poursuivre encore aujourd’hui, montrant que ces 2 courants sont bien ancrés dans les mentalités et ne sont pas près d’en sortir.

1 commentaire:

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