dimanche 11 avril 2010

Philippe Petain

1914, date à laquelle il entre dans l'histoire, il a déjà 58 ans, et ce colonnel sans éclat, totalement inconnu des Frçais, s'apprêtre à prendre une paisible retraite.La guerre va changer le cours de sa vie.


1. Philippe Pétain mythe national

1.1. Le vainqueur de Verdun

* Origines
- Né en 1856 dans une famille de paysans relativement aisés de Picardie. Etudes secondaires dans des collèges religieux et est admis à Saint-Cyr d'où il sort en 1876. Trop jeune pour avoir participé à la guerre de 1870, il mène une carrière militaire sans éclat.
- A la veille de la guerre, il est l'un des rares à défendre la stratégie défensive alors que les chefs de l'armée prônent l'offensive à outrance. Comme de Gaulle, Pétain a donc, à sa manière, été un « rebelle ».
-Ne prend pas parti lors de l'affaire Dreyfus qui déchire l'armée.

* La 1GM
-Bataille de la Marne (sept 1914), s'illustre à la tête de sa brigade → promotion de la part de Joffre: général de brigade en août 1914, il commande déjà une division en septembre 1914 et une armée à la fin de 1915.
Joffre apprécie son calme, son sang-froid et son souci d'économiser les vies humaines.

-Fev 1916, c'est lui qui est choisi pour tenir le secteur stratégique de Verdun. En « remportant» la bataille (c'est-à-dire en repoussant l'offensive du Kronprinz - Verdun est un succès défensif), il acquiert la dimension de véritable héros national. Popularité ++.

-Mai 1917, nommé commandant en chef de l'armée frçaise.

-Eté 1917, à circonscrire le mouvement de mutineries → améliorations de la vie quotidienne des soldats, mais avc une poigne de fer. Fait cesser les grandes offensives meurtrières et attend l'arrivée des forces américaines et des armes nouvelles (chars d'assaut). Il gagne ainsi auprès des soldats la réputation d'un général proche du peuple, paternel et soucieux du moral de la troupe. Les élts du mythe Pétain sont déjà en place.

Cpdt, peu apprécié par Clemenceau, détesté par Foch , il n'est pas choisi pour le poste de généralissime des armées alliées (qui échoit à Foch en mars 1918) et il doit se contenter de demeurer commandant en chef de l'armée française. À cela des raisons essentiellement militaires: Pétain passe pour le principal avocat de la stratégie défensive alors que Foch séduit Clemenceau en prônant le retour à l'offensive (américains + chars d'assaut).

-Nov 1918, il est élevé à la dignité de maréchal de France. Mais c'est Foch qui retire la gloire de l'offensive victorieuse finale.


1. 2. Une progressive entrée en politique

S'affirme au cours des 20's comme le vrai patron de l'armée française. Plusieurs facteurs favorables:
-les autres grands chefs de la guerre (Joffre, Foch, Gallieni) décèdent rapidement et il demeure le seul vainqueur vivant de la Grande Guerre.
-en 1925-1926, il est envoyé au Maroc réprimer la rébellion d'Abd el-Krim → cette victoire dans la guerre du Rif → prestige militaire ++. Il est couvert d'honneur et de gloire par le régime. Blum le décrira, en 1939, comme« le plus noble et le plus humain de nos chefs militaires».
-tire profit de l'immense prestige qui lui assure la domination des anciens combattants dans la société française de l'entre-deux-guerres : Pétain, à leurs yeux, incarne la victoire de 1918.


Aussi, loin de se retirer, il affirme sa présence, d'abord dans le monde militaire, puis peu à peu dans celui de la politique.

- 1920-1931: Vice-président du Conseil supérieur de la guerre. (le président = président du Conseil)
- Impose le maintien de la stratégie défensive et pèse de toute son autorité dans la décision de construire la ligne Maginot. Ce refus d'évoluer, qui traduit « l'ossification» de toute une génération de chefs militaires français, sûrs de leur raison puisqu'ils ont gagné la guerre, le conduit à rompre avec un jeune officier qu'il avait jusque-là protégé et qui faisait figure de « dauphin» potentiel: Charles de Gaulle.

- 1934, après l'émeute du 6 Fév, le prédt du Conseil Doumergue le nomme ministre de la Guerre pr conforter l'union nationale. Son entrée en politique se confirme, ainsi qu'une nette révélation des penchants conservateurs du personnage. En 1934, il donne un célèbre article à la très conservatrice Revue des deux Mondes, dans lequel il fustige l'école républicaine, trop intellectuelle à son goût et incapable d'inculquer aux enfants le culte des vraies valeurs traditionnelles. Il paraît politiquement assez proche de C. Maurras qui célèbre sa noblesse dans maints articles de L'Action française.

-Cpdt, Pétain ne semble pas avoir orchestré ces manœuvres et sa réputation de général républicain est encore forte, puisqu'en 1939, Daladier le nomme ambassadeur auprès de Franco afin de tenter de rapprocher la France et l'Espagne. Au cours de cette ambassade, il affirme son admiration pour les régimes autoritaires.

-18 mai 1940, P. Reynaud, en pleine campagne de France, le fait entrer dans son gouvernement avec rang de ministre d'Etat et de vice-président du Conseil. Reynaud escompte obtenir ainsi la caution morale du vainqueur de Verdun, tout en espérant priver le vieillard de toute responsabilité (Laval commettra la même erreur d'appréciation). En fait, Pétain s'affirme rapidement comme l'un des chefs du clan pacifiste avec Chautemps, Bonnet et le soutien de Laval. Le 16 juin 1940, Lebrun le nomme président du Conseil.




Il. Des pleins pouvoirs à la peine de mort

2.1. La Révolution nationale

Acte fondateur du régime de Vichy: l'armistice du 22 juin 1940.Geste abominable de trahison pour les gaullistes, seule issue raisonnable pour les pétainistes. En fait, Pétain agit au moins autant par souci extérieur (sortir la France de la guerre, sauver ce qui peut l'être) que par souci intérieur (consolider son pouvoir, promouvoir une très profonde rénovation, écarter un éventuel coup de force communiste). Les Français, dans leur immense majorité, approuvent vraisemblablement l'armistice.

Le nouveau régime naît officiellement le 10 juillet 1940, à Vichy, quand les parlementaires de la IIIe République votent les pleins pouvoirs à celui qui se présente comme le sauveur de la patrie.Pétain engage alors l'application du programme de la droite traditionaliste et réactionnaire: destruction des institutions républicaines, instauration d'une dictature personnelle, antisémitisme d'Etat, retour aux valeurs traditionnelles, corporatisme:c'est la Révolution nationale.




Pétain cumule plus de pouvoirs qu'aucun autre chef de l'État français avant lui. Il fait de Pierre Laval son «dauphin », mais le renvoie comme un laquais en décembre 1940 (les 2 hommes ne s'entendent pas et Laval voulait se lancer dans une reconquête militaire de la dissidence gaulliste en Afrique, alors que Pétain recherchait à ce moment un accord avec les Anglais). Le culte du Maréchal atteint des sommets inégalés dans une France traumatisée et abasourdie par la défaite. Faisant « don de sa personne à la France », il bénéficie certainement en 1940, en 1941 encore, d'un authentique soutien populaire.

La grande affaire du régime demeure cependant la collaboration que Pétain inaugure à Montoire en octobre 1940, scellant ainsi le destin de Vichy.



2. 2. L'écroulement du mythe pétainiste

Le pari de Pétain repose sur une double erreur fondamentale d'appréciation:
- l'All va gagner la guerre
- les Allemands sont disposés à jouer le jeu de la collaboration.

Rafles antisémites, instauration du STO, création de la Milice et accentuation de la répression contre les résistants et les communistes....

Le grand virage pour Pétain = nov 1942. Alors que les Allemands occupent la zone Sud, ruinant ainsi le mythe d'un Vichy souverain, et que les Alliés ont débarqué en Algérie, Pétain refuse de suivre l'exemple de Darlan: il demeure en France, certainement par attachement viscéral aux idées de la Révolution nationale auxquelles d'ailleurs plus grand monde ne croit désormais à Vichy et surtout pas Laval. Dès lors, les dés sont jetés: la dernière chance venait de passer; le destin du Maréchal sera lié à celui du régime de Vichy.

Déc 1943, après une vaine tentative de résistance, il doit accepter l'entrée au gouvernement des ultra-collaborationnistes parisiens (Henriot, Darnand, Déat). Ayant perdu tout soutien populaire, le régime, qui n'est plus qu'un satellite de l'Allemagne nazie, sombre dans la collaboration à outrance et la répression aveugle: c'est « l'Etat milicien ».

Pétain conserve encore quelque popularité comme en témoigne son voyage triomphal à Paris en avril 1944. Mais il ne s'agit que des dernières traces d'affection pour un vieillard respecté. Les mêmes Français qui l'acclament (et qui pourront acclamer de Gaulle quatre mois plus tard) haïssent Laval et, en dépit des bombardements anglo-américains, ne souhaitent qu'une chose: la victoire des Alliés et l'écrasement de l'Allemagne. Le pari de Pétain - régénérer la France en s'appuyant sur l'Allemagne - débouche sur un gigantesque échec politique, doublé d'une terrible meurtrissure morale.

Le 20 août 1944, les Allemands l'enlèvent et le conduisent en Allemagne, à Sigmaringen, en compagnie des dignitaires du régime de Vichy. Pétain se considère, enfin, comme prisonnier et refuse d'assumer toute responsabilité. En avril 1945, il se rend aux autorités françaises. Il est jugé par la Haute Cour qui le condamne à mort (15 août 1945) au terme d'un procès bâclé. De Gaulle commue la peine en détention à perpétuité. Pétain est interné au fort du Portal et (où il avait fait enfermer de nombreux dignitaires de la Ille République), puis sur l'île d'Yeu où il meurt en 1951. La dignité de maréchal de France lui avait été retirée et il était frappé d'indignité nationale.

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