LA PRESSE EN FRANCE (1870 1990)

Excusez-moi pour la longueur chers Kamarades de BL, mais Mlle Marty m'a demandé de le faire le plus complet possible.

Problématique: Comment, à partir d'un développement rendu possible grâce aux lois fondamentale de la république, la presse débouche aujourd'hui sur un phénomène de médias caractérisé par la recherche du profit?

1) De 1870 à 1914: "L'âge d'or de la presse française" (expression de P.Albert et F.Terrou)


1.1)La presse avant 1881:

On est passé entre 1800 et 1870 à Paris de la parution de 50000 à 1000000 de tirages. La presse avant 1870 est sous l'égide du pouvoir avec une censure très forte (timbre fiscal, cautionnement) et une répression sévère avec la déportation de journaliste en Algérie (Clemenceau y échappe de peu).

La libéralisation s'opère avec la chute du second empire, cependant la confrontation du pouvoir monarchiste avec la commune de paris limite très fortement les droits de la presse jusqu'en 1878. Cette politique est en parfait accord avec la volonté d'ordre moral du général Mac-Mahon. Elle entraine la disparition complète de la presse socialiste avec la répression de la commune de paris

Le pouvoir ne peut en effet pas s'appuyer sur une presse monarchiste pour déstabiliser la république et décide de condamner toute la presse. L'acmé de ce mouvement a lieu lors de la crise du 16 mai 1877. Le gouvernement de Broeglie tente par tous les moyens de gagner les élections et cela passe par faire taire la presse républicaine. Il y a alors plus de 2000 procès en quelques semaines.


1.2) Lois et développement de la presse politique:

Les lois sur la presse de 1881 sont en chantier depuis 1878 et apporte à la presse française le statut le plan libéral du monde. De plus ces lois sont appliquées très lâchement et on note très peu de procès touchant la presse. Cette loi est suivi d'une explosion du nombre de journaux autant politiques (La Petite République (socialiste)) ou alors divers comme les journaux sportifs. Cependant cette loi est remise en question en 1893 et 1894 par le vote à la chambre des lois scélérates (expression de Jean Jaurès). Ces lois sont la réponse publique à la poussée anarchiste en France qui a suivi l'attentat d'Auguste Vaillant . Elles conduisent à l'interdiction de journaux anarchistes comme Le Père Peinard.

Les crises et les scandales qui surviennent à la fin du XIXe siècle marque un tournant dans l'histoire de la presse en France. Tout d'abord l'antiparlementarisme est exacerbé par les différents scandales comme l'affaire des rubans ("quel malheur d'avoir un gendre") ou le scandale de Panama où de grandes personnalités politiques sont impliquées en tant que chéquard (Clemenceau). Cependant le boulangisme montre l'importance de la presse en France car le général est lancé par l'Intransigeant (journal radical), il reçoit des fonds de la part de Arthur Meyer, patron du Gaulois ou est soutenu par G.Thiebaud, journaliste bonapartiste. Par ailleurs le Figaro Publie le jeu de l'oie du général.

Mais la crise ayant eu le plus grand impact est celle de L'Affaire Dreyfus. L'affaire est relevée par La Libre Parole, le journal de Drumont et provoque une campagne nationaliste et antisémite(Le Matin, La Croix se réclame le journal le plus antisémite de France). J'accuse de Zola montre alors le peu d'engagement qu'il y a derrière le capitaine (96% des journaux sont antisémite en 98). L'affaire stabilise un clivage au sein de la presse qui sera très peu remis en question jusqu'à la guerre et au ralliement derrière l'Union Sacrée. Apparaissent juste des journaux politique comme la revue d'Action Française qui sera un quotidien en 1905 et l'Humanité de Jaurès.

1.3) Le développement d'une presse de masse:

On assiste durant la belle époque à un grand développement de l'industrie journalistique en France. Les techniques d'imprimerie évolue, on voit l'apparition de nouvelles rotatives pouvant imprimer plus de 50000 journaux en une nuit. Certains journaux tirent à de grandes quantités comme Le Petit Journal qui tire à plus de 1 000 000 d'exemplaires en 1890. Dans le même temps, pour fidéliser le lectorat, la presse a recourt a de nouvelles techniques journalistiques comme l'utilisation du fait divers qui assurent les ventes ou la publication de feuilletons qui fidélise la clientèle. On note par ailleurs la création des premières presses spécialisées comme Vélo, L'auto ou encore La Fronde ou La Française journaux à destination des femmes.


2) De 1914 à 1945: Les Aléas de la presse.

2.1) La presse durant la WW1.

La presse subit des difficultés matérielles: plus de 30 journaux disparaissent en 14 a Paris. on voit une centralisation des entreprises: les 5 grands (Le petit Parisien, Le petit journal Le Matin Le journal et L'écho de Paris) passent des accords de diffusion commune. Le papier est rare et rationné les prix des journaux passent de 5 à 10 centimes en 1917(ce qui n'empêche pas l'Intransigeant de faire 50000 tirages quotidiens). Il y a aussi des problèmes de diffusion le réseau ferré étant surchargé de trains militaires.

La presse politique subit aussi un recul car l'activité politique est mise en parenthèse au début de la guerre, les décisions sont prises par ordonnance du gouvernement et par l'état major au niveau militaire. Il n'y a plus au début de la guerre de presse d'opposition, elle est en effet ralliée à l'Union Sacrée. Le consensus affecte autant les socialistes (L'Humanité) que les nationalistes (M.Barres tient une chronique quotidienne dans l'Echo de Paris).

Cependant la guerre implique la restriction des libertés individuelles et parmi elles celle de la presse. Ces mesures ont très bien été acceptée au début du conflit qui devait être court, mais la censure effectuée par le ministère de la guerre (Millérand) est ensuite dénoncé et remise en cause ou détournée par les organes de presse: L'homme libre devient l'Homme enchainé et on assiste à la création du Canard enchainé par Marechal et Gassier. Un phénomène inédit a lieu sur le front avec la création des journaux de tranchées comme le Crapouillot ou Le mouchoir dont les formes satyriques vont influencer le Canard Enchainé.

2.2) Les aléas durant l'entre deux guerres:

On note une stabilisation de l'influence de la presse avec une presse radicale importante sur Paris (L'Oeuvre) et en province La Dépêche et Le Progrès de Lyon. Les communistes se maintiennent autour de L'Humanité, Les catholiques autour de La Croix. Les socialistes ont une vie difficile avec les échec du Populaire et le scandale de la gazette du franc. Les quotidiens de droite conservent leur tirage avec l'Echo de Paris (de H de Kerilys) et le journal de bonne tenu Le Temps. Cependant la différence de pouvoir se ressent autour des hebdomadaires. L'influence de la presse de droite est exacerbée par le maurassisme dans les quotidiens(JSP de Gaxotte) ou les journaux des ligues (Le National des JP).

On voit par ailleurs une montée de la presse antiparlementaire avec la presse Coty (parfumeur corse qui investit dans les journaux de droite), celle ci est corrélée avec des avancées industrielles dans le domaine journalistique qui amènent un saut qualitatif et prolifique dans la publication qui permet d'imprimer en quelques heures 50 000 journaux (au lieu d'une nuit). Ces avancées servent la presse à fort tirages de droite dont les attaques contre le gouvernement coïncide avec la période de forte instabilité gouvernementale qui débouche sur la manifestation du 6 février 1934 ("le coups d'état fasciste a échoué" titre le populaire) et la virulence de la presse atteint son acmé en 1936 avec l'élection du front populaire ("le ministère juif est fait" Maurras).

Cet apothéose a lieu avec l'affaire Salengro, une campagne de diffamation à propos d'un ministre de gauche qui aurait selon la droite déserté(ce qui est faux) durant la première guerre mondiale et qui aboutit à son suicide. Une loi est alors votée par le Front Populaire qui rend obligatoire la publication des financement des journaux afin de moraliser cette presse de droite.

2.3) La presse sous vichy:

Les années noires sont durs pour la presse avec des rationnement du papier et un service de propagande de Vichy qui encadre les journalistes dans le culte du Maréchal (cf: circulaire pour expliquer comment bien décrire le Maréchal Pétain).On assiste durant par ailleurs a une dichotomie de la presse:

Il y a les journaux fascistes comme Au Pilori, Le Cri du Peuple (Doriot), Le Petit Parisien, et certain sont financés par l'ambassade d'Allemagne de Paris(Otto Abetz) comme JSP. Des groupes de presse se forme avec l'apparition de magnat comme Laval qui est à la tête d'un empire de la presse.

D'autre part, il y a un développement d'une presse résistante, poursuivie par les répressions vichyssoise et nazie. Il y a beaucoup de feuille simple, ou de journaux de 4 pages vu la difficulté de trouver le papier. En 1940, ce sont principalement des initiatives individuelles (Conseils à l'occupé de Jean Texier) puis on note une structuration des organes de presse autour des réseaux et des mouvements. La Voix du Nord, Les Cahiers de Témoignages Chrétiens, Combat, Bir-Hakeim. Cette forte politisation et réflexion intellectuelle préfigure la presse de l'après guerre.

3) De 1945 à 1990: Entre renaissance et déclin.

3.1) La Renaissance:

Une situation précaire: A la Libération, le GPRF condamne tous les journaux ayant continué à paraitre durant l'occupation, les locaux et le matériel sont saisis (Le Temps, L'Action Française, La Dépêche de Toulouse) . De plus, les conditions d'après guerre sont défavorable à l'expansion de la presse. En effet, le papier est toujours rationné jusqu'en 1950 et les gens se sont habitués devant la propagande de Vichy à rechercher les informations avec la radio.

Cependant, pour un retour à la normalité républicaine, l'Etat aide la nouvelle presse (voir l'histoire de la création du Monde, et de l'agence France Presse)

La situation à la Libération est propice à l'explosion de la presse résistante: on a un refus de l'héritage des journaux ayant paru sous Vichy et une politisation très forte des journaux qui revendiquent des étiquettes politiques en rapport avec leur passé résistant mais qui ne s'implique uniquement dans les editos . Le Figaro, Le Parisien Libéré (droite); Franc-Tireur(soc), Ce soir(cocos), Libération, Combat. Par opposition à cette presse nationale, on note la création de quotidien régionaux d'information(sans politique): L'indépendant, Le Midi Libre; et d'hebdomadaire sur le format TIME (L'Express (53) et L'Observateur(50)).

3.2) La presse confrontée à de nouveaux médias.

Face à l'arrivée de la télévision, on note une mutation de la presse avec de développement du magazine photo: Paris Match "le poids des mots, le choc des photos" qui porte Pinay et contribue à la création du mythe du sauveur de l'économie française. Paris Match a un impact important aussi dans la décolonisation avec le cartierisme.
Il y a aussi par ailleurs l'apparition de magazine au format américain news magazine. C'est le cas de L'Express (JJSS importe ce modèle américain) qui lui va soutenir PMF et propager l'idéologie du mendèsisme. France-Observateur va voir sa période de gloire avec le conflit Algérien au cours duquel il révèle l'utilisation de la torture.
L'arrêt de l'expansion est du à l'augmentation de la part des médias audiovisuels: en 73 plus de 80% des foyers français sont équipés avec la télévision.

3.3) La crise de la presse indépendante.

Un des modèles les plus enviés est celui du journal Le Monde dont les employés et les lecteurs sont les actionnaires et qui permet une qualité de presse: Un journal Français reconnu internationalement. Son statut change pour la société anonyme. La SA permet le développement de la cartellisation des journaux. On voit alors l'intérêt de grand groupe au monde de la presse: le groupe Hersant possède 30% des quotidiens français. Ce phénomène est visible par la grande diminution du nombre de quotidiens d'information générale (203 en 46-73 en 91).
Ce phénomène se produit aussi en province avec la création de grand groupe (Ouest France, Midi Libre) qui pour garder leur part de marché créent des éditions différentes selon les zones géographiques (La Dépêche du Midi: 220000 exemplaires dans 21 éditions. Ces stratégies permettent à la presse de conserver un lectorat mais perd en quelque sort sa fonction démocratique originelle pour aboutir à la création de capitalisme médiatique.